Formalisme impératif des actes passés pour une société « en formation »

par | 11 mai 2021 | Société

Formalisme impératif des actes passés pour une société « en formation »

Une société n’a la personnalité morale qu’à compter de son immatriculation ; chacun connait cette règle édictée par l’article 1842 du Code civil pour les sociétés civiles et par l’article L 210-6 alinéa 1er du Code de Commerce pour les sociétés commerciales.

Avant immatriculation, la société est dite « en formation ». Elle n’a pas d’existence juridique, elle ne peut donc pas contracter. On précisera que la période de formation d’une société débute à partir du moment où les fondateurs ont décidé de constituer une société et se termine lors de son immatriculation.

A°) Un contrat conclu par une société en formation (et non au nom et pour le compte de celle-ci) est nul. Cette nullité est absolue, l’acte passé est censé n’avoir jamais existé. Il ne peut donc faire l’objet d’une régularisation à posteriori ou être validé par l’exécution des engagements qu’il contenait.

A titre d’exemple on citera un arrêt de la cour de Cassation du 13 novembre 2013 (Cass. Com., 13 novembre 2013, 12-26158) où, en l’espèce, une société d’architecture avait poursuivi un Maître d’Ouvrage défaillant au titre de son obligation de paiement du contrat qu’il avait signé. La société d’architecture a été déboutée de sa demande, le contrat ayant été reconnu nul car signé par un Maître d’ouvrage en cours de formation.

Non seulement le contrat conclu par une société non immatriculée est nul, mais au surplus son signataire ne peut être tenu des engagements souscrits (Cass. com., 10 février 2021, n°19-10.006).

B°) Evidemment des contrats peuvent être conclus pendant la période de formation d’une société, et la pratique a pris pour habitude de faire passer, par les associés de la société, les actes nécessaires à son activité, et de prévoir une reprise des actes par la société après son immatriculation.

Mais cette procédure doit respecter un formalisme précis. En effet, il est primordial que soit expressément mentionné que les actes sont passés au nom et pour le compte de la société en formation. A défaut d’une telle mention expresse, les actes passés sont nulles car considérés souscrits par la société elle-même. Cette nullité pourra être revendiquée à tout moment par les parties au contrat ou par tous tiers intéressés.

C°) Dès lors que ce formalisme est satisfait, il existe trois situations différentes de reprise des actes passés au nom et pour le compte de la société en formation. On rappellera que cette reprise ne saurait être implicite (Cass. com., 13 déc. 2011, no11-10.699).

Acte conclus avant la signature des statuts : la liste des actes accomplis pour la société devra être annexée aux statuts de la société. Les actes seront suffisamment détaillés pour ne pas prêter à doute ou interprétation. Dès l’immatriculation de la société, les actes signés seront automatiquement repris par la société sans autre formalisme ni exigence.

Actes conclus entre la signature des statuts et l’immatriculation de la société : Dès lors qu’un mandat aura été valablement donné, dans les statuts ou par acte séparé, à un ou plusieurs associés ou à un gérant non associé de la société, de passer des actes déterminés au nom et pour le compte de la société, ces actes seront repris automatiquement par la société lors de son immatriculation.

Ratification après l’immatriculation de la société : En l’absence de liste d’actes accomplis pour la société annexée aux statuts ou de mandat donné pour passer certains actes après la signature des statuts, les actes accomplis avant l’immatriculation de la société peuvent être repris par la société s’ils sont approuvés par les associés au terme d’une assemblée générale. Cette décision emportera alors reprise des actes passés.

Dans ces trois hypothèses, ces actes seront réputés être souscrits dès l’origine par la société. La reprise provoque une substitution de contractants. Il y a un effet rétroactif. Inversement, les personnes qui avaient contracté les actes ou qui avaient donné mandat pour les passer se trouvent rétroactivement dégagées de leurs obligations.

Evidemment, tant que l’immatriculation n’est pas intervenue, les personnes qui ont agi au nom et pour le compte d’une société en formation restent personnellement tenues des engagements qu’ils ont souscrits, au sens des articles 1843 du Code civil et L. 210-6 du Code de commerce.

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