Reconstruction des immeubles à l’identique

par | 7 avril 2021 | Construction

Quelles sont les conditions à remplir pour reconstruire un immeuble à l’identique en cas de sinistre ou de démolition ?

Pour être reconstruit à l’identique, l’article L 111-15 du code de l’urbanisme impose que (1) le bâtiment doit avoir été démoli depuis moins de 10 ans, (2) la construction démolie doit avoir été régulièrement édifiée, (3) la reconstruction doit être strictement identique et (4) la possibilité d’une reconstruction à l’identique ne doit pas être exclue par le PLU ou la carte communale.

1. Le bâtiment doit avoir été démoli depuis moins de 10 ans.

Lorsqu’un bâtiment a été régulièrement construit depuis moins de 10 ans, son propriétaire peut procéder à sa reconstruction à l’identique en cas de destruction ou de démolition. La seule condition à ce droit étant qu’aucune règle d’urbanisme locale n’en dispose expressément autrement (cf 3).

Ce délai de 10 ans a été instauré par la loi du 12 mai 2009 qui est venue également préciser que la faculté de reconstruire à l’identique n’était plus limitée aux seuls cas de sinistre mais était également étendue aux travaux de démolition.

Quel délai appliquer aux bâtiments détruits antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 12 mai 2009 ? Le Conseil d’Etat, dans une décision du 21 janvier 2015 (n°382902) a estimé que ce délai n’était opposable qu’à compter de l’entrée en vigueur de la loi du 12 mai 2009 et que les juges disposaient d’une marge d’appréciation pour estimer si la destruction du bien était intervenue dans un délai raisonnable avant le 14 mai 2009.

2. La condition tenant à la régularité de la construction initiale.

Il faut comprendre ici une construction édifiée conformément à une autorisation légale, ou même illégale mais qui serait devenue définitive : Lorsqu’elle a été construite sur la base d’un permis de construire définitif, le permis de construire est considéré comme régulier. A contrario, la reconstruction n’est pas possible pour une construction édifiée sans autorisation ou pour les travaux réalisés en méconnaissance de cette autorisation.

On pourrait s’interroger sur l’application de ce principe aux constructions édifiées avant la loi du 15 juin 1943 qui généralisa les autorisations administratives de construire.

On citera ici :

– un arrêt de la Cour d’Appel de Marseille (30 janvier 2018, n°16MA01168) qui a confirmé l’existence légale d’une construction édifiée avant l’entrée en vigueur de la loi susvisée du 15 juin 1943 ; ou

– un arrêt du 7 juin 2019 (CE, 10ème – 9ème chambres réunies, 07/06/2019, 426966) où la Haute juridiction a estimé que bien que l’existence de construction antérieures à 1943 était démontrée par la consultation d’anciens titres de propriété notariés, cette existence n’était pas suffisante dans la mesure où ces titres ne permettaient pas de démontrer clairement la configuration et l’état des constructions au jour de l’entrée en vigueur de la loi du 15 juin 1943.

En matière administrative, c’est au pétitionnaire de rapporter la preuve de la régularité de la construction.

3. La construction doit être strictement identique.

La reconstruction à l’identique doivent être entendue comme strictement conforme à l’immeuble détruit au sens de l’autorisation administrative initialement délivrée. (CAA Marseille du 20 novembre 2009, n°07MA03486 – CAA Douai n° 12DA00852 du 17 janvier 2013).

Le terme « strictement » n’interdit pas néanmoins, selon la jurisprudence, d’y inclure quelques différences. Tout est dans la sensibilité des juridictions saisies en la matière.

Ainsi le Conseil d’Etat a retenu la légalité d’un permis de construire autorisant la reconstruction d’un hangar, dès lors que « la construction autorisée constitue, comme la précédente, un hangar agricole, qu’elle a les mêmes dimensions, la même implantation, qu’elle ne présente que des aménagements intérieurs et extérieurs mineurs et ne diffère que légèrement de la construction à laquelle elle se substitue » (CE, décembre 1993, Epoux Bohn, req. no 103 884).

Si le tribunal administratif de Strasbourg (30 novembre 2004 n°0300175) a retenu qu’une différence de surface à la hausse de 12m² (sur 400 m² au total) constituait une modification légère remplissant le critère d’identité au sens de l’article L 111-15 du code de l’urbanisme, la Cour d’appel de Marseille a retenu (31 janvier 2007 n°06MA01827) qu’une variation de 33m² (sur 600m² au total) interdisait l’application du même article L 111-15.

4. la possibilité d’une reconstruction à l’identique ne doit pas être exclue par le PLU ou la carte communale.

Depuis un arrêt du Conseil d’Etat du 8 novembre 2017 (n°403599), cette interdiction de reconstruire à l’identique doit être expressément prévue par le Plan Local d’Urbanisme.

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On rappellera qu’en cas de reconstruction à l’identique d’un bâtiment détruit, dans les conditions prévues par l’article L. 111-15 du Code de l’urbanisme, l’obtention préalable d’un permis de construire est exigée.

L’obtention d’un permis de construire matérialise ici le caractère conditionnel du droit de reconstruire, puisque soumis à l’approbation préalable de l’administration. Il vient aussi rappeler que le droit à reconstruire ne constitue pas une dérogation aux règles d’édification des immeubles : l’immeuble reconstruit étant juridiquement un nouvel immeuble, il doit être préalablement autorisé par une autorisation d’administrative et le dépôt d’un dossier de demande permettra notamment aux services compétents de contrôler que le projet de reconstruction est similaire au bâtiment démoli.

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